1991-1992

Début septembre: Si mon intégration dans la vie du Collège et dans la communauté fut aussi facile, c'est grâce à mon nouveau collègue Michel Verrette. J'ai rarement rencontré un collègue ayant autant de qualités de cœur. Très vite Michel et moi devenons des collaborateurs et des amis alors que, lui aussi, avait postulé pour le même poste et qu'en l'obtenant, je l'avais, sans le savoir, privé de pouvoir enfin enseigner en histoire canadienne. Plus tard, quand Micheline viendra me rendre visite en avion, il lui prêtera sa voiture pendant 5 jours sans poser de question afin que l'on puisse découvrir la ville.

Pour ajouter une présence, j'ai pris un colocataire, Pascal, un étudiant qui vient du Québec. Habitué à une maison qui grouille de monde, je me sens ainsi moins seul.

Dans les cours, mes classes sont bondées et je retrouve le même genre d'étudiant vivant en milieu minoritaire. Le programme d'histoire au Collège n'offre pas la 4e année, ni la maîtrise de sorte qu'il n'y a pas de supervision comme à la Laurentienne. Je me rends vite compte combien cela m'était précieux à Sudbury. Superviser un mémoire, c'est faire de la recherche inédite par procuration. Heureusement, il y a mes anciens étudiants de la Laurentienne que je supervise à distance.

Automne: Même si je suis à Winnipeg, Louis-Philippe revient à Sudbury et demande à Gérald du TNO de l'héberger chez lui.

Octobre: Afin de dynamiser le programme d'histoire, je propose la même méthode qu'à la Laurentienne, soit la création d'une Société historique des étudiants du Collège. Très rapidement la SHEC est fondée.

Novembre: L'ACFAS Manitoba, présidée par André Fauchon, est très active au Collège. J'en deviens rapidement membre et je collabore à leurs activités. À compter de janvier, l'ACFAS aura son émission de radio hebdomadaire et j'en serai un des collaborateurs.

En mon absence, le TNO lance, à leur local de la rue King, notre ouvrage historique qui se veut un outil de promotion afin de mousser sa campagne de souscription. Micheline assiste à l'événement de même que les étudiants-auteurs.

2 décembre: Michel et moi déposons une demande de subvention auprès du Collège afin de procéder à un examen de tous les étudiants et étudiantes qui ont fréquenté le Collège depuis 1885. L'objectif est notamment d'identifier les quelques 7,000 personnes qui ont fréquenté le Collège, la durée de leur séjour ainsi que le programme suivi. Cette recherche, qui recevra 3,500$, démarrera deux mois plus tard.

4 décembre: Avant de partir pour 4 semaines à Sudbury, j'envoie des invitations à quelques collèges du Collège afin qu'ils participent en tant qu'invité aux chroniques radiophoniques de l'ACFAS.

Revenu à Sudbury, je rencontre Louis-Philippe qui se dit capable de vivre sa vie. Finalement, je lui trouve quelqu'un chez qui il pourra louer une chambre. Avec Normand, venu nous rendre visite comme à l'habitude, je lui faits amples provisions de bouffe.

24 décembre: J'écris à Kong pour lui donner de nos nouvelles.

Fin décembre: Pendant le congé des Fêtes, l'ex mari de Micheline, Jean-Claude, vient passer quelques jours à la maison. Il nous parle alors de son projet d'aller travailler en Afrique pendant deux ans. Sans qu'on s'en rende compte, sa présence bouleverse Étienne et Marjolaine qui ont, tout à tour, le sentiment de trahir leur père biologique et leur père adoptif. Cela dit, Étienne et Marjolaine ne nous causent alors aucun souci, bien qu'on souhaiterait qu'Étienne soit aussi dédié à ses études que sa sœur.

1992:

15 janvier: C'est la première chronique radiophonique de l'ACFAS Manitoba. Pour l'occasion j'ai préparé la feuille de route.

20 janvier: À Lucie LeBlanc, une étudiante qui a participé au projet du Carrefour et aux voyages de la SHEUL, j'écris une lettre pour l'encourager à poursuivre aux études supérieures. Je lui confie mon attachement grandissant aux étudiants de Saint-Boniface et mon sentiment à l'effet que si je devais retourner travailler à Sudbury, c'est cette année que cela doit se produire, car dans un an je serai trop attaché à me étudiants franco-manitobains.

24 janvier: Un poste s'est ouvert à l'Université du Québec à Trois-Rivières et je décide de proposer ma candidature, mais à certaines conditions. Si ma candidature risque de compromettre celle d'un ancien étudiant comme Claude Bellavance, je me retire du concours.

La SHEC se dote d'une représentation visuelle originale qui pourra servir de bannière. Jean Bozon en est le dessinateur et le concepteur. On y trouve quelques symboles qui rappellent l'Ouest canadien, comme sa célèbre charrette et l'épi de blé, tout en rappelant Saint-Boniface par le dôme de son collège. Des chandails arborant le dessin est vendu aux membres, comme l'avait fait la SHEUL, deux ans plutôt. Dessiné par R.-C. Pitre, le chandail de la SHEUL affichait un slogan «Clio côté cœur» que j'avais forgé en m'inspirant d'une expression que m'avait écrite Ginette la veille de mon départ pour Sudbury.

Mi-février: Micheline et moi estimons qu'il faut vendre notre maison rue McKenzie afin de profiter de l'effervescence immobilière du printemps. Elle et moi avons convenu qu'on ne passerait pas une autre année sans l'autre. Un des scénarios envisagés est un congé sans solde pour elle afin qu'elle vienne explorer les possibilités d'emploi à Winnipeg et au Collège. Si des rumeurs de l'ouverture d'un poste en histoire commencent à courir, le comité du budget de la Laurentienne n'a pas encore approuvé cette dépense, sans compter que le département ne comptant encore aucune femme, il y aura de fortes pressions pour embaucher une historienne plutôt qu'un historien.

Un groupe d'étudiants de la SHEUL rend visite à la SHEC alors que nous leur faisons visiter Winnipeg. Avec Michel, on organise une soirée chez moi où tous les membres des deux sociétés sont présents. Cette rencontre me bouleverse alors que je suis confronté entre mes anciennes amitiés étudiantes et mes nouvelles.

Fin février: Je remets à mon doyen, André Fréchette, mon rapport annuel.

Début mars: On ouvre finalement un poste en histoire canadienne. Si des collègues et des amis, comme Dyane Adam, Dieter et Geoff, ont exercé des pressions, multiplié les lettres pour que cela se fasse, si mon ex-directeur du département, Angus Gilbert, a aussi mis l'épaule à la roue, il faut aussi souligner le rôle de la SHEUL, menée alors habilement par Jacques Taillefer. Sans que je le sache, la SHEUL avait, en effet, exercé plusieurs pressions auprès de l'administration et du gouvernement.

15 mars: Je soumets ma candidature pour le poste d'histoire canadienne à l'Université Laurentienne.

17 mars: La Revue d'histoire de l'Amérique française accuse la réception d'un nouvel article que je signe avec Claire-Andrée Fortin et Robert Décarie, mes collaborateurs du GREBE. Notre texte expose les difficultés méthodologiques surmontées pour procéder à l'évaluation des volumes des bois prélevés sur les territoires attikamek et montagnais. D'une certaine manière, l'article une fois accepté, permettra de valider auprès de la communauté scientifique, notre démarche et notre recherche.

23 mars: La réception des commentaires émis par mon doyen, à la suite de la remise de mon rappport annuel, m'amène à rédiger une réponse que je lui transmets. M'ayant notamment reproché une certaine vulgarité dans mes propos tenus en classe, je reviens sur ce reproche qui n'est pas dénudé de fondement.

Avril: Pierre Ouellette, dont j'ai supervisé la recherche à distance, soutient avec succès son mémoire de baccalauréat à l'Université Laurentienne sur les tristes événements de Reesor Siding.

Une ancienne étudiante impliquée dans L'Orignal déchaîné, Marie-Noël Shank, gagne à son tour le prix du recteur de l'Université Laurentienne et met la main sur 8,000$.

13 avril: J'écris à Suzanne pour discuter avec elle du partage des dépenses pour que Louis-Philippe puisse continuer à vivre seul comme pensionnaire à Sudbury.

Début mai: Je suis recommandé par le département d'histoire de l'Université Laurentienne pour le poste en histoire canadienne en français. Ce poste me permettrait, pour la première fois, de partager avec Gaétan Gervais les cours d'histoire canadienne et nord-américaine. Toutefois, il reste à discuter avec mon futur doyen, Walter Schawger, des modalités du contrat, parmi lesquelles figurent la question centrale de la reconnaissance des années de service antérieures dans le calcul de la sabbatique. Malheureusement, il est trop tard pour annuler la vente de notre maison rue McKenzie car nous avons quelques jours auparavant accepté une offre. En mon absence, Micheline cherche une maison qui doit être absolument située le long du trajet du service d'autobus du centre-ville vers le campus universitaire. Elle trouve la perle rare rue David, à 5 minutes du lac Ramsey.

20 mai: J'écris à mon futur doyen Walter Schawger afin de le presser de finaliser notre entente.

21 mai: Ayant obtenu des assurances par mon futur doyen de mon embauche, je peux offrir ma démission au Collège.

26 mai: La Laurentienne m'offre un contrat qui correspond à mes attentes en termes de projet de sabbatique.

De ce séjour, il reste bien des souvenirs qui seraient tous heureux, si ce n'était de ce sentiment d'avoir abandonné des amis et des étudiants. Alors que je suis encore au Collège, une campagne de souscription met en vente des dessins originaux de l'artiste Réal Bérard. Ces dessins ont servi de matériel visuel à un court métrage d'animation de l'ONF dont la trame sonore est composée de la belle chanson de Daniel Lavoie, «Jours de plaine». L'écoute de cette chanson me chamboule toujours autant.

19 juin: La famille emménage au 151 rue David à Sudbury.