2011: D'histoire et de mycologie
31 Décembre-1er janvier: C'est au tour d'André et de Guillaume de nous recevoir pour le réveillon du jour de l'An dans leur condo de la rue Sainte-Catherine. Comme à l'habitude j'ai bien fêté!!
Mi-janvier: J'ai terminé les dernières corrections de l'article sur l'histoire des sciences. Comme je l'indique à Jacques Cayouette qui m'a beaucoup aidé: «J'ai procédé sans t'attendre à une révision de mon article à la lumière des belles remarques faites par quatre évaluateurs anonymes de la revue MENS. J'ai pu ainsi corriger le tir en amputant le texte de cet épisode du récit fondateur (qui tombait comme un cheveu sur la soupe), en recentrant le texte sur l'évolution des sciences telle qu'illustrée par la mycologie (plutôt que sur René Pomerleau qui sert alors seulement d'excuse et d'amorce au texte) et en nuançant fortement cette impression que je laissais d'une rupture totale du CMM provoquée par cette arrivée des botanistes universitaires au conseil d'administration. Ainsi j'ai éliminé cette expression d'une professionnalisation de la mycologie pour plutôt insister sur l'apport considérable des amateurs au développement des connaissances mycologiques, Jean Després et Renée Lebeuf étant deux bels exemples.»
31 janvier : L'épouse de mon père, Lucienne, a commencé des traitements pour ses yeux à l'hôpital Maisonneuve. Ne pouvant obtenir les services d'un spécialiste en Abitibi, elle prend le bus de nuit avec mon père pour arriver au petit matin à Montréal. Micheline et moi allons les chercher ce jour-là pour les amener à l'hôpital puis les ramener juste à temps pour qu'ils reprennent le bus de 14h00 pour Val-d'Or. Essayez une fois cet aller-retour en bus dans la même journée et vous trouverez que c'est physiquement très exigeant.
Il y a aussi ma mère dont je m'occupe beaucoup. Deux fois par semaine je lui rends visite afin de m'assurer qu'elle ne manque de rien.
1er février: Mandaté par le Cercle des Mycologues de Montréal afin de collaborer avec le Cercle des Jeunes Naturalistes de Montréal j'amorce des échanges avec le Cercle. Un premier texte sur les sporées des champignons serait le bienvenu pour leur revue et bientôt, je proposerai de développer le sujet pour en faire un article dans leur série des feuillets électroniques.
Mi- février: Un problème vient de surgir au sujet de notre projet de publier la correspondance entre Harry Bernard et Simone Routier car je devrai renouveler l'autorisation de publier les lettres de Simone Routier contenues dans le fonds Harry-Bernard. Sans une nouvelle autorisation des ayant-droit de la famille Routier, la BAnQ par l'intermédiaire de sa représentante, Estelle Brisson, nous refusera leur accord. Notre projet de publier cette correspondance, déjà bien avancé aux éditions David, est gravement compromis. J'en ferai état dans une lettre à Marc Haentjens le 27 février. Finalement nous aurons eu plus de peur que de mal puisque nous obtiendrons cette autorisation.
7 mars: J'écris à Raymond McNeil un courriel lui expliquant mes sentiments quant à mes divergences de vue avec Jean Després au sujet de son projet d'une encyclopédie sur les champignons: «Quand je parle du poids des mots qui sépare mon appartenance disciplinaire qu'est l'histoire à la vôtre des sciences pures, il y a la connotation de certains mots. Pour Jean, un champignon hallucinogène est toxique et fait partie de la liste des champignons qui provoquent des problèmes, il est en quelque sorte proscrit et ...diabolisé. Du point de vue de l'historien, l'homme a de tout temps cherché à fuir le réel en ayant recours aux hallucinogènes et à l'alcool... de sorte que le constat de son utilisation régulière l'humanise en quelque sorte et le rend beaucoup plus positif à mes yeux. La connotation est bien différente. Il y a ici une divergence radicale de point de vue... Je refuserai toujours de ramener l'amanite tue-mouches au simple rang de champignon toxique. Comme l'alcool, il doit être présenté, dans la section historique, comme un fait de société et non un poison.»
Ces divergences vont rapidement m'amener à retirer les textes que je devais rédiger et notamment un long article sur les champignons dans l'histoire humaine. Seule la dernière partie de cet essai - essai qui je dois l'admettre maintenant n'était pas mon meilleur- sera récupérée dans un court texte portant sur l'ergot de seigle et les sages-femmes et qui sera publié à l'automne dans la revue Quatre Temps.
9 avril: Je fais parvenir à Jean Després un long courriel dans lequel j'explique pourquoi il m'est impossible de poursuivre ma collaboration à son projet d'encyclopédie. Derrière ces malentendus se dessine une approche scientifique radicalement différente qu'il m'a pris du temps à comprendre et que j'ai tenté d'expliquer à l'époque dans un courriel. Trouvant tout à fait légitime son approche, je ne peux pas pour autant y souscrire. Si je résumais en quelques phrases, je dirais que dans les sciences pures, tout comme dans son projet encyclopédique, la liste des ingrédients est cohérente, fermée et chacun de ses éléments contribue au tout. En histoire, la liste des faits est infinie de sorte qu'il faut choisir et lui donner une cohérence. Pour eux, aspirer à l'exhaustivité permet de ne pas douter alors que l'historien ne joue qu'avec le possible et l'incertain.
Mi-avril: On reçoit enfin le nouveau certificat de localisation de la petite propriété que nous voulions acheter à Rivière-Ouelle avec Jean-Claude et Alexandre. Les courbes des zones inondables de 20 ans et de 100 ans maintenant mises à jour laissent apparaître des risques suffisamment élevés pour nous autoriser à retirer notre offre d'achat à quelques semaines de la signature du contrat. Il était minuit moins une!
Avec Louis-Philippe je monte à Val-d'Or afin de célébrer le 86e anniversaire de mon père. On y prend plusieurs photos dont celle-ci que j'aime beaucoup. Ce sont ses grosses mains de travailleur manuel qui ressortent et qui font tellement contraste avec son extrême douceur.
29 avril: Départ pour la Bourgogne et le Valais en Suisse. Cette fois le voyage n'est que de 4 semaines car je ne veux pas m'éloigner longtemps de ma mère. Étant donné que le récit de ce voyage est déjà en ligne, je m'arrête seulement sur le plaisir éprouvé de voir à quelques reprises Claudine et Serge qui habitent Sion. Et parmi les images les plus fortes qui me restent il y a cette ascension jusqu'à la Pierre Avoi qui domine le Valais. Avec Étienne, François et Rex, j'ai profité d'une belle avant-midi pour admirer le paysage.

Début juin: Mis en ligne du feuillet traitant de la sporée des champignons sur le site du Cercle des Jeunes Naturalistes. J'ai beaucoup aimé rédiger cet essai de vulgarisation qui me rapproche de mon ancien métier de professeur et qui me permet de recycler quelques photographies prises dans nos activités mycologiques à Sudbury. J'ai tellement aimé que j'ai fait approuver par le CJN la conception d'un autre feuillet sur le calcul de l'âge de certains champignons.
9 juin: Réélu comme membre du conseil d'administration du CMM, je lance l'idée lors d'une réunion ce jour-là de réorganiser nos archives en procédant à la numérisation de nombreux documents à commencer par les procès-verbaux de nos réunions. Si l'historien n'a pas sa place dans une encyclopédie sur les champignons, il se trouve, en revanche, fort à l'aise dans les archives institutionnelles!
24 juin: Après avoir passé en revue avec Micheline les épreuves de notre prochain livre sur la correspondance entre Harry Bernard et Simone Routier je fais parvenir à Yvon Mallette une liste de remarques et de corrections qu'il complètera.
15 juillet: Encore cette année, Micheline et moi demandons une subvention dans le cadre du programme pour les retraités de l'Université Laurentienne.
28 juillet: Ce matin-là, Micheline et moi sommes allés chercher Lucienne et Albert pour une autre visite à l'hôpital Maisonneuve. Cette fois, le traitement a été plus long qu'à l'habitude et on les ramène à la gare d'autobus en arrivant légèrement après le départ du bus à 14h00. Micheline se met à la poursuite du bus en voiture et rendue sur la rue Saint-Denis elle devance le bus puis applique les freins; le chauffeur n'a d'autres choix que d'ouvrir sa portière, permettant ainsi à nos deux Val-d'Oriens médusés de s'y engouffrer. Cette histoire a souvent été racontée dans la famille comme un exploit!
Début août: Nous avons reçu nos 25 exemplaires de notre livre sur la correspondance entre Harry Bernard et Simone Routier. Un livre de plus qui dormira dans quelques bibliothèques et qui me survivra après ma mort!
12-13 août: Je prends l'avion pour Sudbury, à l'invitation de Stéphane Gauthier, du Carrefour francophone, afin de procéder à une excursion urbaine dans le centre-ville de Sudbury qui sera filmée. J'en profite pour revoir Dieter et je couche chez mon ami Yvon Gauthier.
22 août : On m’accorde la subvention FRUL de 4800$! Je pourrai ainsi obtenir une copie numérisée du Courrier de Saint-Hyacinthe pour toutes années où Harry Bernard fut un collaborateur.
9-10-11 septembre : Je passe trois jours chez François et Annette à Montmagny afin de leur donner un coup de main dans la préparation d'une séance d'initiation à la mycologie. Ils ont lancé l'invitation à toute la communauté avec un rendez-vous fixé le 11 septembre au Musée de la Mémoire vivante de Saint-Jean-Port-Joli. L'institution a offert la possibilité d'utiliser leur grand domaine comme terrain de cueillette et d'identification. 54 personnes se présenteront et devant cet intérêt Annette et François iront de l'avant avec l'idée de la création d'un club régional qui verra le jour à l'automne sous le nom du Cercle de mycologie des Appalaches.
Septembre-Octobre: Publication dans la revue Quatre Temps de mon article sur l'ergot de seigle et les sages-femmes.
26 octobre: Dans un courriel envoyé à François et Annette j'exprime mes inquiétudes sur l'évolution de la santé de ma mère: De mon côté ma mère ne cesse de perdre du poids et la tête. Cette maladie ralentit même ses réflexes: elle fume beaucoup moins mais mange aussi beaucoup moins. Tellement que cela en est préoccupant: elle pèse 44 kilos!. À ce rythme-là elle devra être placée, d'ici une dizaine de mois, au maximum un an, dans un CHSLD public et miteux comme c'est le cas pour tous ceux qui n'ont pas d'argent. Des préposés sous-payés la prendront par la main pour tous ses besoins de sorte que j'aurai sans doute moins de responsabilité. Pour le moment, je vis d'espoirs toujours déçus.
29-30 octobre: Court voyage à Québec afin de visiter l'exposition du musée des beaux-arts et de fêter, rue Cartier, l'anniversaire de Micheline.
8 novembre: Pour la Société d'étude et de conférences de Montréal, je donne une conférence sur l'histoire festive de l'amanite-tue-mouches devant une centaine de personnes à l'Auditorium Saint-Albert-le-Grand. Cette conférence, que j'avais d'abord testée en juin à la résidence Villagia de Laval, n'est pas celle d'un mycologue mais plutôt d'un historien intéressé par les champignons! Ce jour-là alors que la foule ne cesse de grossir, Micheline et moi essayons sans succès de brancher le canon sur notre ordinateur portable. Mais heureusement Micheline a apporté son nouveau cellulaire et 5 minutes avant le début de la conférence elle rejoint Étienne à son travail qui nous explique comment faire. Eh oui un cellulaire peut être utile, ai-je dû admettre.
21 novembre: Mon père fait un ACV en passant la guignolée avec ses Chevaliers de Colomb de Val-d'Or.
25 novembre : Je monte avec Louis-Philippe en Abitibi dans un aller-retour dans la même journée afin de voir mon père mourant à l’hôpital. La veille ou l'avant-veille, ses derniers mots audibles auraient été adressés à Suzette, une des filles de Lucienne. Puisqu'elle avait pris congé pour venir le voir, il lui aurait dit de retourner travailler. Le travail d'abord, cela aura été son leitmotiv toute sa vie. À notre arrivée, il est incapable de parler, mais comprend tout ce qu'on lui dit. Paralysé du côté gauche, il me prend la main avec sa main droite et me secoue le bras. Ces images ne cesseront de me hanter.
27 novembre: Décès d’Albert Gaudreau. Peu de temps après son décès, je me rends compte que je l'imite depuis longtemps dans une de ses manies. Mon père lorsqu'il bâillait avait tendance à exagérer ses bâillements en les machant et en les articulant. Cher papa, je fais pareil!
Décembre; Mise en ligne de mon article sur l’âge des polypores au CJN.
1er-2 décembre 2011: Louis-Philippe et sa famille, Etienne et nous montons à Val-d'Or pour assister aux funérailles qui se déroulent comme dans les films. Les Chevaliers de Colomb viennent nombreux au salon; costumés et alignés devant le cercueil, ils procèdent à l'appel. Un à un, chacun répond présent. Puis, on appelle à 3 reprises ALBERT GAUDREAU, sans réponse. En lieu et place, un silence de mort qui étouffe nos sanglots. Au cimetière, un à un on jette une poignée de terre sur le cercueil.
24 décembre: Pour Noël, on reçoit les enfants et petits-enfants de même que ma mère.
29 décembre: Dans un courriel envoyé à Benoit Chartier, propriétaire du Courrier de Saint-Hyacinthe, je lui expose mes découvertes sur la vie de Harry Bernard grâce au dépouillement systématique de son journal dans lequel Bernard se faisait fort de publier ses faits et gestes. L'idée de mettre sur Internet les textes de Bernard est émise pour la première fois.
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